Edito

Qui sommes-nous et qui voulons-nous être ? Voilà peut-être les deux questions qui nous viennent à l’esprit en présentant les travaux en cours sur les constitutions et le charisme. S’y trouve au centre une réflexion profonde et collective sur ce qui fait notre essence, notre singularité et notre raison d’être.

Depuis plus de deux ans, nous partageons nos pensées, nos réflexions, nos avis et points de vue. Nous faisons route ensemble. Notre réforme ne nous éloigne pas, elle nous confronte et nous réunit, dans nos diversités. Elle nous permet de considérer notre histoire à la lumière de cet avenir que nous nous attachons tous à construire pour Jérusalem.

Pour reprendre – et étendre – les mots du P. Philippe Toxé o.p., en travaillant sur les constitutions et le charisme, nous sommes en train de traduire nos vies en Jérusalem dans le langage canonique pour que les constitutions soient le vrai reflet de notre vie. C’est un exercice difficile et qui ne peut se faire que collectivement. C’est un exercice capital pour assurer la continuité mais aussi la pérennité de notre communauté.

Nos chantiers avancent bien. Nous y consacrerons une nouvelle lettre d’information d’ici la fin de l’été. La réforme avance avec la volonté de ne laisser personne au bord du chemin. Nous en voulons pour preuve la mise en place par les sœurs d’une nouvelle démarche d’accompagnement et d’écoute. Un signe de plus de l’humanité de notre processus de réforme, qui interroge nos institutions tout en étant attentifs au respect de celles et ceux qui vivent en elles.

L’équipe « Information » des Fraternités de Jérusalem.
Sœur Marie-Laure, sœur Marlene, frère Grégoire, frère Marc-Abraham
et Paul-Hervé Vintrou (membre des fraternités laïques de Jérusalem)

TRAVAIL SUR LES CONSTITUTIONS     

Questions au Frère Philippe Toxé, canoniste

A quoi servent les constitutions d’un institut ? Quelle place ont-elles pour la vie des frères ou des sœurs ?

Les constitutions constituent l’élément fondamental du droit propre de l’institut : elles décrivent son charisme, c’est-à-dire sa vocation propre (la nature, le but, l’esprit et le caractère de l’institut) ; elles précisent ses structures essentielles et son mode du gouvernement et les règles fondamentales concernant la discipline et la formation des membres.
Les constitutions constituent donc l’ADN de l’institut. Ce texte de référence est l’un des textes étudiés pendant la formation. Il est la norme de référence pour la vie des religieux, un peu comme le « contrat social » de l’institut. 
Les constitutions ne sont pas figées et peuvent évoluer. Leur texte harmonise entre eux les éléments spirituels, théologiques et juridiques qui permettent de définir l’identité de l’institut.
Les constitutions complètent le droit universel et ne peuvent y déroger.

Quels sont les enjeux, pour un institut, de retravailler ses constitutions ?

Les constitutions sont votées à un moment donné de l’histoire d’un institut. Elles correspondent à ce que vit une communauté à ce moment donné. L’institut peut évoluer, la législation canonique de l’Église a pu changer, et avec le temps, certaines formulations peuvent paraître obsolètes. Il devient alors nécessaire de les formuler de manière renouvelée pour la nouvelle étape de la vie de l’institut. Retravailler les constitutions peut se faire à l’initiative des membres de l’institut, ou à la demande de l’autorité référente l’Église. Ce travail tient compte des évolutions de la vie de l’institut. 
La vie précède le droit. A chaque grande étape de son histoire, on tient compte de l’expérience des membres pour modifier les constitutions. Ces modifications sont nécessairement soumises à l’autorité compétente de l’Église.
Les constitutions d’un institut constituent son patrimoine, qui est reçu par une communauté. Il est transmis en l’enrichissant, afin que le charisme originel reste audible dans l’époque où on vit et tienne compte de la réalité dans laquelle il est déployé.

A partir de votre expérience avec d’autres communautés, qu’est-ce que ce travail d’aggiornamento a pu changer pour elles ?

Les communautés anciennes ont eu plusieurs fois à réformer leur fonctionnement et à modifier leurs constitutions. En particulier, suite au concile Vatican II, puis à la réforme du code de droit canonique de 1983. Pour ceux qui participent à ces évolutions, c’est un moment privilégié d’appropriation du charisme et des structures. Ces constitutions qu’ils ont lues et reçues, les religieux sont invités à les reformuler eux-mêmes à nouveau frais. Il s’agit d’un événement communautaire, d’un travail synodal qui implique tous les frères ou toutes les sœurs, par des travaux en commissions, des échanges communautaires, et un dialogue avec l’Église.
Les constitutions doivent en effet être soumises in fine à l’approbation de l’évêque ou du dicastère romain ; il ne s’agit pas là d’un simple contrôle technique, mais d’une démarche de communion par laquelle l’Église authentifie l’identité de l’institut.

Quel est le rôle du canoniste dans ce travail ?

Son rôle est essentiellement technique. Ce sont les membres de l’institut qui rédigent leurs constitutions. 
Le rôle du canoniste est triple :
 – D’abord, il vise à donner des conseils sur la manière de procéder et la méthode, afin que le travail de révision soit le plus fructueux possible ;
 – Ensuite, il remplit le rôle de connaisseur du droit universel. Il va ainsi préciser ce qui est possible ou obligatoire, ce qui doit être retravaillé…
 – Enfin, il doit aider les rédacteurs afin que la rédaction soit de facture juridique. Il s’agit d’éviter les deux excès : une rédaction trop spirituelle, avec de pieuses considérations ; ou au contraire un texte d’une pure technicité juridique et trop éloigné de la vie des religieux. 
Dans une expression célèbre, Blaise Pascal distingue l’esprit de finesse et l’esprit de géométrie. D’un côté, on tiendra compte de l’intuition et des expériences, de l’autre on recherchera des formes concises, claires, et qui honorent le caractère juridique. 
Il s’agit donc de traduire la vie dans le langage canonique.

On parle de constitutions, mais aussi de directoires ou de droit secondaire : de quoi s’agit-il ?

Les constitutions forment le texte fondamental, elles sont votées par le chapitre général de l’institut et soumises à l’approbation du l’autorité de tutelle. Elles doivent relever d’une certaine stabilité et on n’y entre pas dans les détails. Les éléments susceptibles de modifications plus fréquentes sont renvoyés dans des textes secondaires dont la modification ne nécessite pas le même formalisme.
Ces autres textes normatifs forment des codes secondaires, avec des textes d’application, les précisions et les développements des normes essentielles figurant dans les constitutions. Il s’agit par exemple de la charte de formation, la charte des études, les normes économiques, le règlement intérieur…
Par exemple, le contenu du vœu de pauvreté est inscrit dans les constitutions ; mais la manière dont on rédige un testament, dont organise concrètement la gestion des biens et des ressources peut figurer dans un directoire ad hoc.

Présentation :

Frère Philippe Toxé est dominicain, du couvent de Lyon. 
Il est canoniste, c’est-à-dire spécialiste en droit canonique (l’ensemble des normes juridiques qui régit la vie et l’organisation de l’Église catholique). 
Il est juge ecclésiastique à l’officialité de Lyon, enseignant au studium de droit canonique de Lyon, et conseiller canonique auprès de communautés religieuses.

TRAVAIL EN COURS CHEZ LES SŒURS     

En chemin vers le chapitre général des sœurs

Sur nos chemins de discernement et de réforme, frères et sœurs marchent à des rythmes différents. Pour l’institut des sœurs, cette année aura lieu, comme tous les sept ans, le chapitre général électif, c’est-à-dire l’élection de la prieure générale et de son conseil. Nous nous y préparons de plusieurs façons : temps de formation, groupes de travail et accompagnements spécifiques…

Session de formation sur la gouvernance

Une session de formation sur la gouvernance s’est déroulée lundi 4 mars sous forme de webinaire. Cette formation marquait le début d’un travail mené en Fraternité dans la perspective du chapitre général du mois d’août au cours duquel les sœurs éliront leur prieure générale. Avec cette échéance, et au cœur de notre processus de réforme, de grandes questions se posent : de quelle autorité a besoin notre institut aujourd’hui ? Quelle structure de gouvernance ? Quel type d’autorité locale /générale ? Quel est le sens de l’autorité de la prieure générale et locale ? Quelle est la matière de son autorité et de quelle manière l’exerce-t-elle ? Étant conscientes de la nécessité de nous former et d’avoir des repères objectifs pour mener cette réflexion, nous avons sollicité trois intervenants dont la compétence et l’expérience nous sont d’une grande aide. Une première approche juridique nous a été donnée par Me Catherine Fabre, avocate au barreau de Paris, afin de comprendre le cadre juridique de l’exercice de l’autorité dans la vie consacrée et notre droit propre. Fr. Philippe Toxé, o.p., canoniste, a ensuite présenté les différentes formes possibles de structures des Instituts religieux dans le droit canonique et la tradition de l’Église. Il a pu aussi définir le rôle respectif d’une prieure générale et d’une prieure locale et leurs compétences, selon le droit canonique. Quelle gouvernance pour des communautés en phase de transition ? Telle était la question posée à notre dernier intervenant, Luigino Bruni, économiste et sociologue, membre des Focolari : il nous a notamment invitées à réfléchir sur les nécessaires ruptures à vivre entre la gouvernance d’un fondateur et celle d’un responsable de communauté aujourd’hui. Ces trois approches, très complémentaires, sont de réelles pistes de réflexion pour la suite du travail.

Sœur Claire

Groupes de travail sur l’autorité et le charisme

Suite à la session de formation, les fraternités ont été invitées à poursuivre la réflexion sur l’autorité de la prieure générale : son sens, sa matière, la manière de l’exercer. Le travail portait aussi sur l’articulation de l’autorité entre le niveau général et le niveau local. Chaque Fraternité a préparé un compte-rendu de ses travaux et le comité de pilotage, composé de 4 sœurs, s’efforcera d’en faire une synthèse pour le dossier des sœurs qui vont participer au chapitre général (capitulantes). 
Par ailleurs, un petit groupe de trois sœurs travaille sur la rédaction de notre « propos fondamental », c’est-à-dire de notre charisme, en vue de reformuler le début de nos constitutions. Toutes les sœurs sont consultées et invitées à réagir sur leur proposition de texte, qui sera ensuite retravaillé.

Sœur Anne-Catherine

Démarche d’accompagnement et d’écoute

Une autre étape dans notre démarche de réforme et de discernement consiste dans la mise en place, pour l’institut des sœurs, d’une réflexion interne pour aborder des thèmes tels que le climat de confusion affective, en vue de nommer, corriger et prévenir des dysfonctionnements. Pour cela, deux personnes ont donné leur disponibilité pour nous accompagner et proposer un espace d’écoute : Madame Ghislaine Petit, psychologue qui collabore avec l’INIRR, et sœur Anne Descour, psychothérapeute et provinciale des religieuses de l’Assomption. 
Le but de ce processus est de pouvoir déposer notre propre parole sur l’histoire, des gestes, paroles, situations troublantes que nous avons pu vivre, ou dont nous étions témoins, de la part du fondateur, d’un frère ou d’une sœur, pour ensuite analyser ce qui pourrait favoriser ou pas des fonctionnements non ajustés, en vue d’une part de les corriger et d’autre part de les prévenir.
Les sœurs qui le désirent ont donc été invitées à témoigner. Cette étape d’écoute se terminera fin juin. Ensuite, les écoutantes transmettront – tout en respectant la confidentialité de la démarche – leurs échos dans le cadre d’une rencontre du conseil général avec les assistants apostoliques. Le nouveau gouvernement, qui sera élu en août 2024, aura alors la tâche de réceptionner et de discerner pour l’étape suivante.   

Sœur Marlene

TRAVAIL EN COURS CHEZ LES FRÈRES     

Notre chemin vers les Constitutions :
mieux exprimer notre charisme

Dans le cadre de la réforme de nos instituts et suite à la demande de Rome (DIVCSVA) de « mieux exprimer le charisme qui nous est propre », quelques frères du conseil général ont été missionnés pour commencer la rédaction d’un document qui cherche à formuler la vocation des frères de Jérusalem et à en identifier les fondements. Ils ont largement puisé dans le travail effectué par les chantiers de la réforme, ainsi que dans les échanges entre frères lors de nos assemblées à La Flatière (janvier 2023) et à Burtin (août 2023). 
Un premier document a été rédigé, enrichi d’apports à la suite de consultations de frères de l’institut, de laïcs proches de nos communautés, d’autres religieux, de théologiens, etc… 
Fin janvier, il a été abordé et discuté par les frères prieurs réunis à l’abbaye de Scourmont. Ils ont ainsi proposé une pédagogie pour que le travail sur ce document puisse se poursuivre en fraternités.
A partir du document de travail obtenu et intitulé « La vocation des frères de Jérusalem aujourd’hui », nous vivons maintenant un temps d’appropriation et de débat avec tous les frères de l’Institut. Chaque fraternité doit en effet échanger sur ce document en vue de l’affiner. Il s’agit de préparer notre prochaine assemblée de Burtin, fin août 2024, lors de laquelle nous espérons pouvoir alors voter un texte d’ensemble qui servira de base pour la rédaction des Constitutions et les orientations de formation.

Frère Marc-Abraham

Dans le document « La vocation des frères de Jérusalem aujourd’hui », la piste qui est explorée pour clarifier notre charisme donne une approche selon trois axes : 
   1. notre rapport à la Parole de Dieu, 
   2. la fraternité comme mode de relation à la suite du Christ, 
   3. une présence fraternelle au monde qui précise notre expérience 
       monastique propre. 
La liturgie et le travail professionnel, deux expressions typiquement monastiques, sont présentés comme les éléments qui unifient ces trois axes.

Lancement de deux nouveaux chantiers

Les chantiers lancés l’année dernière sont sur le point de se conclure, et nous développerons prochainement les résultats auxquels ils ont abouti. Le travail avançant, deux nouveaux sujets sont apparus nécessaires : d’une part, les ministères ordonnés, et spécialement le ministère des prêtres, et d’autre part la place des vocations de frère en solitude et de familier.

Chantier sur les ministères ordonnés : 

Parmi les frères de Jérusalem, certains ont été ordonnés prêtre ou diacre, et d’autres ne le sont pas. Le sujet de ce nouveau chantier consiste à préciser comment l’institut appelle un frère à l’ordination, et en vue de quel ministère :

 – quelle est l’identité spécifique du ministre ordonné dans le contexte d’une vocation
monastique ?

 – en vue de quels types de mission et de tâches veut-on ordonner un frère dans notre institut ?
 – quelle doit être la forme du lien ordinaire de ces frères à l’Église locale, à son prieur, aux autres frères, aux sœurs et aux laïcs ? 
 – quelle procédure d’appel au ministère et quelle formation doit-on mettre en place ?

Chantier sur les frères en solitude et les familiers :

Notre vocation de Jérusalem intègre la possibilité pour un frère de davantage de solitude, et pour cela, d’une vocation qui diffère des frères en communauté. Depuis les origines, plusieurs frères ont vécu ainsi comme semi-ermite dans la ville. A cette étape de la vie de notre institut, il est nécessaire de faire un point sur ces expériences, et d’envisager les formes possibles pour la suite. 
Par ailleurs, la vocation de familier régulier (en communauté) et de familier séculier (vivant en autonomie dans la ville) demande également ce type de bilan et de prospective pour garantir la pérennité de ces vocations. C’est l’objet de ce chantier ; il était nécessaire que les autres chantiers aient avancés pour pouvoir ouvrir ces deux nouveaux sujets. 

Frère Grégoire

© 2024 Fraternités Monastiques de Jérusalem  
Lettre d’information « Discernement & réforme » – communication@fraternites-jerusalem.org

Edito

Qui sommes-nous et qui voulons-nous être ? Voilà peut-être les deux questions qui nous viennent à l’esprit en présentant les travaux en cours sur les constitutions et le charisme. S’y trouve au centre une réflexion profonde et collective sur ce qui fait notre essence, notre singularité et notre raison d’être.

Depuis plus de deux ans, nous partageons nos pensées, nos réflexions, nos avis et points de vue. Nous faisons route ensemble. Notre réforme ne nous éloigne pas, elle nous confronte et nous réunit, dans nos diversités. Elle nous permet de considérer notre histoire à la lumière de cet avenir que nous nous attachons tous à construire pour Jérusalem.

Pour reprendre – et étendre – les mots du P. Philippe Toxé o.p., en travaillant sur les constitutions et le charisme, nous sommes en train de traduire nos vies en Jérusalem dans le langage canonique pour que les constitutions soient le vrai reflet de notre vie. C’est un exercice difficile et qui ne peut se faire que collectivement. C’est un exercice capital pour assurer la continuité mais aussi la pérennité de notre communauté.

Nos chantiers avancent bien. Nous y consacrerons une nouvelle lettre d’information d’ici la fin de l’été. La réforme avance avec la volonté de ne laisser personne au bord du chemin. Nous en voulons pour preuve la mise en place par les sœurs d’une nouvelle démarche d’accompagnement et d’écoute. Un signe de plus de l’humanité de notre processus de réforme, qui interroge nos institutions tout en étant attentifs au respect de celles et ceux qui vivent en elles.

L’équipe « Information » des Fraternités de Jérusalem.
Sœur Marie-Laure, sœur Marlene, frère Grégoire, frère Marc-Abraham
et Paul-Hervé Vintrou (membre des fraternités laïques de Jérusalem)

TRAVAIL SUR LES CONSTITUTIONS     

Questions au Frère Philippe Toxé, canoniste

A quoi servent les constitutions d’un institut ? Quelle place ont-elles pour la vie des frères ou des sœurs ?

Les constitutions constituent l’élément fondamental du droit propre de l’institut : elles décrivent son charisme, c’est-à-dire sa vocation propre (la nature, le but, l’esprit et le caractère de l’institut) ; elles précisent ses structures essentielles et son mode du gouvernement et les règles fondamentales concernant la discipline et la formation des membres.
Les constitutions constituent donc l’ADN de l’institut. Ce texte de référence est l’un des textes étudiés pendant la formation. Il est la norme de référence pour la vie des religieux, un peu comme le « contrat social » de l’institut. 
Les constitutions ne sont pas figées et peuvent évoluer. Leur texte harmonise entre eux les éléments spirituels, théologiques et juridiques qui permettent de définir l’identité de l’institut.
Les constitutions complètent le droit universel et ne peuvent y déroger.

Quels sont les enjeux, pour un institut, de retravailler ses constitutions ?

Les constitutions sont votées à un moment donné de l’histoire d’un institut. Elles correspondent à ce que vit une communauté à ce moment donné. L’institut peut évoluer, la législation canonique de l’Église a pu changer, et avec le temps, certaines formulations peuvent paraître obsolètes. Il devient alors nécessaire de les formuler de manière renouvelée pour la nouvelle étape de la vie de l’institut. Retravailler les constitutions peut se faire à l’initiative des membres de l’institut, ou à la demande de l’autorité référente l’Église. Ce travail tient compte des évolutions de la vie de l’institut. 
La vie précède le droit. A chaque grande étape de son histoire, on tient compte de l’expérience des membres pour modifier les constitutions. Ces modifications sont nécessairement soumises à l’autorité compétente de l’Église.
Les constitutions d’un institut constituent son patrimoine, qui est reçu par une communauté. Il est transmis en l’enrichissant, afin que le charisme originel reste audible dans l’époque où on vit et tienne compte de la réalité dans laquelle il est déployé.

A partir de votre expérience avec d’autres communautés, qu’est-ce que ce travail d’aggiornamento a pu changer pour elles ?

Les communautés anciennes ont eu plusieurs fois à réformer leur fonctionnement et à modifier leurs constitutions. En particulier, suite au concile Vatican II, puis à la réforme du code de droit canonique de 1983. Pour ceux qui participent à ces évolutions, c’est un moment privilégié d’appropriation du charisme et des structures. Ces constitutions qu’ils ont lues et reçues, les religieux sont invités à les reformuler eux-mêmes à nouveau frais. Il s’agit d’un événement communautaire, d’un travail synodal qui implique tous les frères ou toutes les sœurs, par des travaux en commissions, des échanges communautaires, et un dialogue avec l’Église.
Les constitutions doivent en effet être soumises in fine à l’approbation de l’évêque ou du dicastère romain ; il ne s’agit pas là d’un simple contrôle technique, mais d’une démarche de communion par laquelle l’Église authentifie l’identité de l’institut.

Quel est le rôle du canoniste dans ce travail ?

Son rôle est essentiellement technique. Ce sont les membres de l’institut qui rédigent leurs constitutions. 
Le rôle du canoniste est triple :
 – D’abord, il vise à donner des conseils sur la manière de procéder et la méthode, afin que le travail de révision soit le plus fructueux possible ;
 – Ensuite, il remplit le rôle de connaisseur du droit universel. Il va ainsi préciser ce qui est possible ou obligatoire, ce qui doit être retravaillé…
 – Enfin, il doit aider les rédacteurs afin que la rédaction soit de facture juridique. Il s’agit d’éviter les deux excès : une rédaction trop spirituelle, avec de pieuses considérations ; ou au contraire un texte d’une pure technicité juridique et trop éloigné de la vie des religieux. 
Dans une expression célèbre, Blaise Pascal distingue l’esprit de finesse et l’esprit de géométrie. D’un côté, on tiendra compte de l’intuition et des expériences, de l’autre on recherchera des formes concises, claires, et qui honorent le caractère juridique. 
Il s’agit donc de traduire la vie dans le langage canonique.

On parle de constitutions, mais aussi de directoires ou de droit secondaire : de quoi s’agit-il ?

Les constitutions forment le texte fondamental, elles sont votées par le chapitre général de l’institut et soumises à l’approbation du l’autorité de tutelle. Elles doivent relever d’une certaine stabilité et on n’y entre pas dans les détails. Les éléments susceptibles de modifications plus fréquentes sont renvoyés dans des textes secondaires dont la modification ne nécessite pas le même formalisme.
Ces autres textes normatifs forment des codes secondaires, avec des textes d’application, les précisions et les développements des normes essentielles figurant dans les constitutions. Il s’agit par exemple de la charte de formation, la charte des études, les normes économiques, le règlement intérieur…
Par exemple, le contenu du vœu de pauvreté est inscrit dans les constitutions ; mais la manière dont on rédige un testament, dont organise concrètement la gestion des biens et des ressources peut figurer dans un directoire ad hoc.

Présentation :

Frère Philippe Toxé est dominicain, du couvent de Lyon. 
Il est canoniste, c’est-à-dire spécialiste en droit canonique (l’ensemble des normes juridiques qui régit la vie et l’organisation de l’Église catholique). 
Il est juge ecclésiastique à l’officialité de Lyon, enseignant au studium de droit canonique de Lyon, et conseiller canonique auprès de communautés religieuses.

TRAVAIL EN COURS CHEZ LES SŒURS     

En chemin vers le chapitre général des sœurs

Sur nos chemins de discernement et de réforme, frères et sœurs marchent à des rythmes différents. Pour l’institut des sœurs, cette année aura lieu, comme tous les sept ans, le chapitre général électif, c’est-à-dire l’élection de la prieure générale et de son conseil. Nous nous y préparons de plusieurs façons : temps de formation, groupes de travail et accompagnements spécifiques…

Session de formation sur la gouvernance

Une session de formation sur la gouvernance s’est déroulée lundi 4 mars sous forme de webinaire. Cette formation marquait le début d’un travail mené en Fraternité dans la perspective du chapitre général du mois d’août au cours duquel les sœurs éliront leur prieure générale. Avec cette échéance, et au cœur de notre processus de réforme, de grandes questions se posent : de quelle autorité a besoin notre institut aujourd’hui ? Quelle structure de gouvernance ? Quel type d’autorité locale /générale ? Quel est le sens de l’autorité de la prieure générale et locale ? Quelle est la matière de son autorité et de quelle manière l’exerce-t-elle ? Étant conscientes de la nécessité de nous former et d’avoir des repères objectifs pour mener cette réflexion, nous avons sollicité trois intervenants dont la compétence et l’expérience nous sont d’une grande aide. Une première approche juridique nous a été donnée par Me Catherine Fabre, avocate au barreau de Paris, afin de comprendre le cadre juridique de l’exercice de l’autorité dans la vie consacrée et notre droit propre. Fr. Philippe Toxé, o.p., canoniste, a ensuite présenté les différentes formes possibles de structures des Instituts religieux dans le droit canonique et la tradition de l’Église. Il a pu aussi définir le rôle respectif d’une prieure générale et d’une prieure locale et leurs compétences, selon le droit canonique. Quelle gouvernance pour des communautés en phase de transition ? Telle était la question posée à notre dernier intervenant, Luigino Bruni, économiste et sociologue, membre des Focolari : il nous a notamment invitées à réfléchir sur les nécessaires ruptures à vivre entre la gouvernance d’un fondateur et celle d’un responsable de communauté aujourd’hui. Ces trois approches, très complémentaires, sont de réelles pistes de réflexion pour la suite du travail.

Sœur Claire

Groupes de travail sur l’autorité et le charisme

Suite à la session de formation, les fraternités ont été invitées à poursuivre la réflexion sur l’autorité de la prieure générale : son sens, sa matière, la manière de l’exercer. Le travail portait aussi sur l’articulation de l’autorité entre le niveau général et le niveau local. Chaque Fraternité a préparé un compte-rendu de ses travaux et le comité de pilotage, composé de 4 sœurs, s’efforcera d’en faire une synthèse pour le dossier des sœurs qui vont participer au chapitre général (capitulantes). 
Par ailleurs, un petit groupe de trois sœurs travaille sur la rédaction de notre « propos fondamental », c’est-à-dire de notre charisme, en vue de reformuler le début de nos constitutions. Toutes les sœurs sont consultées et invitées à réagir sur leur proposition de texte, qui sera ensuite retravaillé.

Sœur Anne-Catherine

Démarche d’accompagnement et d’écoute

Une autre étape dans notre démarche de réforme et de discernement consiste dans la mise en place, pour l’institut des sœurs, d’une réflexion interne pour aborder des thèmes tels que le climat de confusion affective, en vue de nommer, corriger et prévenir des dysfonctionnements. Pour cela, deux personnes ont donné leur disponibilité pour nous accompagner et proposer un espace d’écoute : Madame Ghislaine Petit, psychologue qui collabore avec l’INIRR, et sœur Anne Descour, psychothérapeute et provinciale des religieuses de l’Assomption. 
Le but de ce processus est de pouvoir déposer notre propre parole sur l’histoire, des gestes, paroles, situations troublantes que nous avons pu vivre, ou dont nous étions témoins, de la part du fondateur, d’un frère ou d’une sœur, pour ensuite analyser ce qui pourrait favoriser ou pas des fonctionnements non ajustés, en vue d’une part de les corriger et d’autre part de les prévenir.
Les sœurs qui le désirent ont donc été invitées à témoigner. Cette étape d’écoute se terminera fin juin. Ensuite, les écoutantes transmettront – tout en respectant la confidentialité de la démarche – leurs échos dans le cadre d’une rencontre du conseil général avec les assistants apostoliques. Le nouveau gouvernement, qui sera élu en août 2024, aura alors la tâche de réceptionner et de discerner pour l’étape suivante.   

Sœur Marlene

TRAVAIL EN COURS CHEZ LES FRÈRES     

Notre chemin vers les Constitutions :
mieux exprimer notre charisme

Dans le cadre de la réforme de nos instituts et suite à la demande de Rome (DIVCSVA) de « mieux exprimer le charisme qui nous est propre », quelques frères du conseil général ont été missionnés pour commencer la rédaction d’un document qui cherche à formuler la vocation des frères de Jérusalem et à en identifier les fondements. Ils ont largement puisé dans le travail effectué par les chantiers de la réforme, ainsi que dans les échanges entre frères lors de nos assemblées à La Flatière (janvier 2023) et à Burtin (août 2023). 
Un premier document a été rédigé, enrichi d’apports à la suite de consultations de frères de l’institut, de laïcs proches de nos communautés, d’autres religieux, de théologiens, etc… 
Fin janvier, il a été abordé et discuté par les frères prieurs réunis à l’abbaye de Scourmont. Ils ont ainsi proposé une pédagogie pour que le travail sur ce document puisse se poursuivre en fraternités.
A partir du document de travail obtenu et intitulé « La vocation des frères de Jérusalem aujourd’hui », nous vivons maintenant un temps d’appropriation et de débat avec tous les frères de l’Institut. Chaque fraternité doit en effet échanger sur ce document en vue de l’affiner. Il s’agit de préparer notre prochaine assemblée de Burtin, fin août 2024, lors de laquelle nous espérons pouvoir alors voter un texte d’ensemble qui servira de base pour la rédaction des Constitutions et les orientations de formation.

Frère Marc-Abraham

Dans le document « La vocation des frères de Jérusalem aujourd’hui », la piste qui est explorée pour clarifier notre charisme donne une approche selon trois axes : 
   1. notre rapport à la Parole de Dieu, 
   2. la fraternité comme mode de relation à la suite du Christ, 
   3. une présence fraternelle au monde qui précise notre expérience 
       monastique propre. 
La liturgie et le travail professionnel, deux expressions typiquement monastiques, sont présentés comme les éléments qui unifient ces trois axes.

Lancement de deux nouveaux chantiers

Les chantiers lancés l’année dernière sont sur le point de se conclure, et nous développerons prochainement les résultats auxquels ils ont abouti. Le travail avançant, deux nouveaux sujets sont apparus nécessaires : d’une part, les ministères ordonnés, et spécialement le ministère des prêtres, et d’autre part la place des vocations de frère en solitude et de familier.

Chantier sur les ministères ordonnés : 

Parmi les frères de Jérusalem, certains ont été ordonnés prêtre ou diacre, et d’autres ne le sont pas. Le sujet de ce nouveau chantier consiste à préciser comment l’institut appelle un frère à l’ordination, et en vue de quel ministère :

 – quelle est l’identité spécifique du ministre ordonné dans le contexte d’une vocation monastique ?
 – en vue de quels types de mission et de tâches veut-on ordonner un frère dans notre institut ?
 – quelle doit être la forme du lien ordinaire de ces frères à l’Église locale, à son prieur, aux autres frères, aux sœurs et aux laïcs ? 
 – quelle procédure d’appel au ministère et quelle formation doit-on mettre en place ?

Chantier sur les frères en solitude et les familiers :

Notre vocation de Jérusalem intègre la possibilité pour un frère de davantage de solitude, et pour cela, d’une vocation qui diffère des frères en communauté. Depuis les origines, plusieurs frères ont vécu ainsi comme semi-ermite dans la ville. A cette étape de la vie de notre institut, il est nécessaire de faire un point sur ces expériences, et d’envisager les formes possibles pour la suite. 
Par ailleurs, la vocation de familier régulier (en communauté) et de familier séculier (vivant en autonomie dans la ville) demande également ce type de bilan et de prospective pour garantir la pérennité de ces vocations. C’est l’objet de ce chantier ; il était nécessaire que les autres chantiers aient avancés pour pouvoir ouvrir ces deux nouveaux sujets. 

Frère Grégoire

© 2024 Fraternités Monastiques de Jérusalem  
Lettre d’information « Discernement & réforme » – communication@fraternites-jerusalem.org