Où en sommes-nous ? 

Sœurs, frères ou laïcs, nous sommes éprouvés profondément car nous avons pris conscience de dysfonctionnements structurels au sein de la famille de Jérusalem. 
Honte, amertume et tristesse : ce sont les émotions qui sont les nôtres à chaque mise en cause de nos communautés et de leur fondateur dans des livres ou les médias. 
Colère et désarroi étreignent nos cœurs devant les souffrances psychologiques inacceptables endurées par des sœurs ou des frères qui nous étaient ou sont encore proches. Qu’ils aient quitté la communauté ou qu’ils soient encore parmi nous, nous souffrons avec eux de ce qu’ils ont vécu ou vivent encore comme des traumatismes et des injustices.
C’est pourquoi nous nous sommes engagés dans un processus de discernement et de réforme avec l’aide des deux assistants apostoliques qui nous ont été donnés par le Dicastère des religieux.
Information, dialogue et transparence : voilà notre contribution et notre engagement pour vous rendre compte, par cette lettre d’information et les suivantes, de l’avancée des chantiers que nous avons mis en œuvre depuis notre rencontre du mois d’août 2022 à Magdala.
Voilà ce qui nous anime : cette nouvelle espérance pour que chacun puisse pleinement vivre l’appel commun qui nous a rassemblés en Jérusalem.

L’équipe « Information » des Fraternités de Jérusalem.
Sœur Anne, sœur Marie-Laure, frère Grégoire, frère Marc-Abraham
et Paul-Hervé Vintrou (membre des fraternités laïques de Jérusalem)

Le contenu de cette lettre d’information :

POURQUOI NOUS EN SOMMES LÀ     

Notre reconnaissance des dysfonctionnements

Pour rendre compte des dysfonctionnements, voici un verbatim des « échos de la visite apostolique », retours de la Visite apostolique de 2021, que les assistants apostoliques, sœur Emmanuelle Maupomé, s.a. et frère Bruno Cadoré, o.p., nous ont adressé en mai 2022. Ce qu’ils pointent concorde avec les constats que nos frères et sœurs sortis ont dénoncés à la cellule d’écoute. Ces maladies diagnostiquées constituent le point de départ des travaux dans lesquels les frères et sœurs se sont lancés. Comme vous le comprendrez, ces chantiers vont nécessiter du temps et de la persévérance.

« Nous sommes vraiment inquiets devant le grand nombre de sœurs et de frères rencontrés qui ne vont pas bien : fatigue, épisodes de dépression ou de « burn-out », sentiment amer d’avoir été trop peu écoutés et respectés comme personnes, voire malmenés… [Nous voyons] aussi des signes de santé qui permettent de penser qu’un chemin est possible. »

« Bien des éléments de la personnalité [du fondateur], de la manière dont il a conduit cette fondation, sont à double valence, à la fois porteurs de grâces mais aussi de risques qui ont pu laisser des traces dans vos pratiques actuelles… Nous avons pu avoir le sentiment qu’à certains moments le succès de sa fondation passait avant le bien des personnes. Certains se sont parfois sentis utilisés, voire instrumentalisés… et ont été mis en danger humain et spirituel, voire un peu « brûlés ». »

« La fatigue et le malaise [des frères et sœurs] ne tiennent peut-être pas seulement à votre rythme mais à une question plus fondamentale, liée à la manière dont votre charisme s’est constitué… un mille-feuille qui peine à trouver sa propre cohérence, son propre point d’équilibre. »

« L’autorité semble s’exercer sur un mode très abbatial, mais bien des règles de sagesse et d’équilibre du gouvernement abbatial semblent peu pratiquées, comme le principe de subsidiarité ou celui de l’exercice de vrais contre-pouvoirs… ainsi que le peu de place réellement donnée à l’autorité des Chapitres Généraux. »

« Nous avons bien souvent noté l’absence de lieux et processus de décisions et d’action, clairs, objectifs, identifiables par tous et toutes, justes aux deux niveaux, local et général : ce qui ouvre la voie soit à des décisions arbitraires des supérieurs, soit à l’incapacité à prendre ensemble de vraies décisions et à faire évoluer le système. »

« L’absence de politique de formation va de pair avec l’absence de réflexion globale sur la place des études de théologie et la forme qu’elles doivent prendre pour s’intégrer dans la vie religieuse de chacun/e. »

« [Pour la relation entre les frères et les sœurs], l’absence de processus réguliers et clairs de concertation et de décision commune entre les communautés locales, comme entre les supérieurs généraux aboutit inévitablement à des situations complexes… [et une incapacité à] définir ensemble le « commun » du charisme de Jérusalem. »

« Un certain flou quant au droit et aux règles canoniques a parfois fait grande violence à certaines personnes et à certaines fraternités… la Congrégation suggère d’entreprendre un travail de révision des Constitutions, en lien avec des canonistes ; on doit tout particulièrement veiller à… assurer les contre-pouvoirs et les possibilités de recours, ainsi que ceux permettant la subsidiarité… [pour que] la responsabilité de chacun(e) soit promue. »

Sœur Emmanuelle Maupomé et frère Bruno Cadoré, assistants apostoliques

Les 4 axes de réforme demandés par Rome

Dans la lettre du 30 mars 2022 adressée à nos Fraternités par le préfet du Dicastère pour les religieux, le Siège apostolique donne des directives et indications pour accompagner un processus de discernement et de réforme. Celui-ci se déroulera selon quatre axes : 

  • mieux exprimer le charisme qui nous est propre ; 
  • retravailler nos textes canoniques (les Constitutions) ; 
  • poursuivre l’élaboration d’un programme de formation permanente à la lumière du charisme ; 
  • célébrer une Assemblée générale des deux Instituts, avec des temps communs et des temps propres à chaque Institut, afin de prendre les décisions nécessaires pour mettre en œuvre ce processus de réforme. 

Nous entrons avec confiance dans ce processus et exprimons notre gratitude envers l’Eglise qui accompagne avec sollicitude cette nouvelle étape de la vie de nos Instituts.

LES TRAVAUX EN COURS     

Mettre en route
un processus de discernement et de réforme

(article publié dans la Lettre de Jérusalem n° 24 de septembre 2022)

Du 22 au 26 août, les frères et sœurs – presque tous réunis à Magdala – ont vécu une assemblée de travail avec nos assistants apostoliques, sœur Emmanuelle Maupomé et frère Bruno Cadoré, afin de mettre en route un processus de discernement et de réforme demandé à nos Instituts par le Dicastère pour les Instituts de Vie Consacrée et les Sociétés de Vie Apostolique (DIVCSVA), dans le but de remédier à des dysfonctionnements relevés au cours de la récente visite apostolique ou dénoncés par des témoignages d’anciens membres des Fraternités. Un comité animateur composé de six frères et sœurs qui ne sont pas en responsabilité d’autorité dans nos Instituts a participé avec les assistants apostoliques à l’organisation de ces journées. En tant que membres de ce comité, nous avons pu expérimenter une grande confiance et un large espace d’expression : ce fut une expérience très précieuse et formatrice, bien qu’éprouvante physiquement et psychologiquement. La joie de travailler ensemble frères et sœurs dans une ambiance vraiment fraternelle, avec respect et liberté, a été une grande richesse.

La première étape a été de nous écouter les uns les autres : il a été important que chacun puisse s’exprimer sur sa perception et sa position par rapport aux événements qui ont marqué la vie de ‘Jérusalem’ au cours des trois dernières années. Ces journées ont laissé l’espace à la parole de chacun : peur ou confiance, souffrance et colère parfois. Même si elle n’est pas toujours facile à entendre et à recevoir, une parole un peu plus vraie a pu se vivre entre nous.

Cela a été l’occasion de prendre en compte les inquiétudes et les blessures qui ont pu émerger et être exprimées – parfois par des cris de souffrance et de désespoir – par les frères et sœurs, mais aussi celles qui nous sont parvenues de ceux et celles qui ont quitté nos communautés ; et d’avancer ainsi dans une prise de conscience des dynamiques problématiques ou mauvaises qui traversent nos communautés.
Nous avons aussi pris le temps de recevoir ensemble ce qui fait notre identité de ‘Jérusalem’ avec l’objectif tout particulier de mettre en valeur ce qui nous anime, afin d’identifier les axes fondamentaux de la vie et du patrimoine de ‘Jérusalem’. Des convergences sont très vite apparues dans les thèmes abordés, ouvrant sur des bases communes et laissant croire qu’il y aurait peu de divergences. En réalité, travailler les éléments plus en profondeur a mis en lumière que leur compréhension ou encore leur mise en œuvre concrète révélaient des divergences de fond entre frères et sœurs ou encore entre membres d’un même Institut.
Nous avons ainsi pris conscience de l’extrême diversité des attentes de chacun vis-à-vis des réformes à entreprendre : si nous avons tous le désir d’avancer, nous n’avons pas tous la même notion du temps et des priorités. Il nous faudra aussi grandir dans ce processus de discernement communautaire ouvert cet été, pour assumer sereinement les différences de point de vue et de vision qui émergent au fil des échanges.

Au-delà des questions que nous travaillons frères et sœurs en commun, nous avons pu toucher du doigt le fait que chaque Institut rencontre des problématiques propres ou a besoin d’approfondissements sur certains sujets particuliers. Une journée a ainsi été consacrée au travail par Institut séparément : sœurs et frères ayant ainsi la possibilité, chacun de leur côté, de s’informer, de réfléchir et d’échanger sur des thématiques qui leur sont propres. Ainsi la question délicate de la gouvernance a été abordée par les sœurs : des mots précis ont pu être posés, partagés, et un travail sur les dysfonctionnements à ne plus reproduire a pu voir le jour. Les frères ont pu échanger sur leurs inquiétudes, voire leurs peurs, et leurs convictions et certitudes quant à l’expression de l’identité propre des frères de Jérusalem, la question des petits effectifs et leur perception de la communion frères-sœurs.
Autant de questionnements qui touchent fondamentalement notre vocation, et la possibilité de s’en saisir – même si les temps de dialogue et de travail ont parfois pu se révéler laborieux ou tendus – a permis de commencer à mettre un peu plus de clarté et d’ouvrir des pistes pour l’avenir.

Au terme de ces cinq journées, plusieurs chantiers à engager ont émergé. Parmi eux, ceux du rythme de vie, du rapport au travail, de la gouvernance, de la communion entre frères et sœurs, de la formation, de la liturgie, de l’histoire de nos communautés, … Le travail va continuer dans les semaines et mois qui viennent pour, au terme, ajuster la vie de nos communautés à ces exigences nouvelles et pouvoir en rendre compte au DIVCSVA.

Sœurs Arlette, Claire et Maria-Magdalena &
frères Carlo, Marc-Abraham et Victor-Marie

Les chantiers “discernement & réforme” :
comment ça marche ?

A la suite de nos rencontres fraternelles de fin août à Magdala, 9 chantiers prioritaires ont été identifiés pour remédier aux dysfonctionnements. Des feuilles de route ont été élaborées à partir du travail effectué par l’ensemble des frères et sœurs présents, par les deux prieurs généraux de nos Instituts, et par les deux assistants apostoliques qui accompagnent ce “chemin de discernement et de réforme” de nos Instituts.
Ces chantiers sont confiés à des équipes de petites tailles : 3 frères d’un côté, 3 sœurs de l’autre. Les frères et les sœurs travaillent indépendamment afin de prendre en compte les questions propres à leur Institut, et croisent ensuite leurs résultats. Ces comités se sont mis au travail depuis plusieurs semaines, et se réunissent régulièrement, pour la plupart de façon hebdomadaire.
Dans le cadre de leur travail, ils ont pu et peuvent faire appel à différents frères et sœurs de nos Instituts (notamment les « groupes miroir » dont le rôle est de réagir et de conseiller les membres du comité dans l’avancement du chantier), à l’ensemble des frères et sœurs sous forme de consultation plus large, ou encore à des laïcs, des experts extérieurs à nos communautés, certains de ces experts ayant été nommés par les assistants apostoliques.

Les 9 chantiers prioritaires concernent l’histoire et le fondateur, la gouvernance, la liturgie et vie de prière, la compréhension de la Communion frères-soeurs, le rythme de vie, la formation permanente, le Livre de Vie, la compréhension du rapport au travail et les questions économiques.

1. Chantier “Histoire et fondateur”

Les deux comités (2 frères, 3 sœurs) du chantier : Histoire et Fondateur, après avoir démarré ce chantier avec les assistants, ont réfléchi séparément puis ensemble à la nature du travail historique à faire et à la collaboration avec un ou plusieurs historiens.
Avec l’aide des frères du « groupe-miroir » et des sœurs qui avaient manifesté de l’intérêt pour ce chantier, nous avons collecté les questionnements importants par rapport à notre histoire et à frère Pierre-Marie.  Nous avons commencé à faire le recensement de tous les documents sources que nous avons, et à établir une chronologie de l’histoire des Fraternités.
Nous avons également eu une rencontre avec sœur Rafala qui nous a expliqué les normes de communication des archives, dans la société civile et dans l’Église, surtout par rapport à la discrétion et à la protection de la vie privée des personnes encore vivantes.
Enfin, un contact a été pris par les prieurs généraux et leurs conseils avec l’historien que les assistants ont pressenti pour le travail. Si ce choix est confirmé, nous espérons entrer bientôt en contact avec lui.
Nous travaillons aussi sur un cadre qui aiderait nos Fraternités, selon ce qui nous est demandé, à déterminer la manière de se référer à frère Pierre-Marie et à ses écrits en attendant les conclusions du travail historique.

Sœurs Christine, Hannah, Marie-Laure
& frères Antoine-Emmanuel et Charles-Marie

2. Chantier « Gouvernance »

Côté sœurs

Pour ne pas passer à côté d’éléments déterminants pour l’avancée de ce chantier, nous avons besoin de prendre le temps nécessaire pour une étude approfondie. Nous voulons recueillir ensemble ce qui nous est dit personnellement et communautairement, à travers la relecture et l´analyse des dysfonctionnements nommés, afin de trouver des réponses adaptées. Il s’agit pour nous de faire, autant que possible, un travail sur les racines, les nœuds des dysfonctionnements en faisant appel à différentes ressources interdisciplinaires.
Si nous avons décidé de consacrer six mois de travail à la relecture (avec de l’aide externe) et au classement des dysfonctionnements, c’est parce que nous les prenons au sérieux et que nous voulons leur donner toute leur importance. Il s´agit d´abord d´entendre la souffrance, de prendre conscience des répercussions que ces dysfonctionnements ont pu causer, d´aider à reconnaître nos responsabilités et à les prendre. Il s’agit aussi de prendre conscience des conséquences que ces dysfonctionnements ont pu avoir sur notre conception même de l’obéissance et notre manière d’obéir.
C’est pourquoi nous commençons un travail de classification et de qualification des dysfonctionnements avec différents experts (théologiens, canonistes, personnes de longue expérience de la vie consacrée, psychologues, civilistes, etc …) pour objectiver et nommer ce qui peut être considéré comme abus, maladresse, flou, erreur, manque de bon sens ou de savoir-faire, manque de respect ou ignorance du droit ecclésial dans nos structures et manières de gouverner, mais aussi pour commencer à trouver des chemins de transformation, de conversion, des voies de sortie.

Sœurs Anne-Catherine, Anne-Claire, Claire et Maria-Magdalena  

Coté frères

Dans un premier temps, le travail du chantier “gouvernance” est d’établir une liste et d’effectuer une relecture des dysfonctionnements observés et vécus dans l’Institut des frères. Nous avons donc réalisé un questionnaire afin d’interroger tous les frères de l’Institut, dans le but, une fois les réponses rassemblées, d’en proposer une analyse, en lien avec le rapport de la cellule d’écoute et les documents de la visite apostolique. Le questionnaire envoyé aux frères est également l’occasion de recenser les expériences positives de vie capitulaire, de synodalité et subsidiarité dont ils ont fait l’expérience ces dernières années. De manière simultanée, notre groupe a commencé de faire des recherches documentaires sur le vœu d’obéissance et tout particulièrement la “matière” de ce vœu, en nous laissant interroger par ce que les autres traditions monastiques et religieuses proposent. 

Frères Jean-Yves, Marc-Abraham et Théophane

3. Chantier « Liturgie et vie de prière »

Côté sœurs

Le but de notre chantier est, dans l’immédiat, de faire un état des lieux de notre vie de prière sous tous ses aspects et pour cela nous avons élaboré un questionnaire, envoyé à chaque sœur. Cela nous permettra de mieux comprendre quels sont les points qui « souffrent » le plus et ceux qui, au contraire, « se portent bien ». En fonction de cela, nous pourrons envisager le travail à faire ensuite. Une autre partie du travail est de collecter ce qui a été travaillé par l’une ou l’autre d’entre nous sur le thème de la liturgie ou de la prière, en général, pour en faire une sorte de « bibliothèque » à mettre à la disposition de tous. La troisième partie concerne la collecte de tout ce qui s’est fait dans les différentes fraternités comme adaptations de la liturgie et des raisons qui ont porté à ces choix.

Sœurs Joanna, Marie-Aimée et Petra 

Coté frères

Le chantier s’est mis au travail en reprenant à son compte les documents de la cellule d’écoute et les « échos de la visite apostolique », ainsi que des orientations suggérées par le conseil des frères. Une consultation individuelle est organisée pour que chaque frère puisse s’exprimer sur sa réception de ces documents et sur ce qu’il souhaite vivre de manière plus unifiante dans sa vie de prière et la liturgie de Jérusalem. Nous rassemblons aussi les initiatives déjà engagées dans certaines fraternités pour améliorer la qualité de la liturgie. Parallèlement, des contacts sont pris avec des personnes extérieures qualifiées pour nous éclairer dans notre démarche.

Frères Pierre-Adrien, Stéphane-Marie et Victor-Marie

4. Chantier « Compréhension de la communion frères et sœurs de Jérusalem »

Côté sœurs

Notre travail dans le chantier « Compréhension de la communion frères et sœurs de Jérusalem » a commencé par une première étape d’état des lieux et d’analyse. C’est de manière distincte qu’il nous a été proposé de la mener, frères d’un côté et soeurs de l’autre, afin que, de chaque côté, nous puissions aller au bout des questionnements et de l’écoute des points de convergence et de dissensus, sans a priori, en évitant de pseudo-évidences qui risqueraient de s’imposer. C’est ainsi que, côté sœurs, nous avons mis en place dans chaque fraternité un travail sur le lexique de notre relation frères/soeurs : communion, autonomie, complémentarité, etc… pour tâcher de voir quelle(s) réalité(s) se cachent derrière ces mots que nous utilisons si souvent. Nous avons également envoyé un questionnaire à chaque sœur de l’Institut, lui permettant de rendre compte d’expériences positives ou plus difficiles avec les frères, et d’en proposer une relecture. En ce début de février 2023, la phase de collecte des données touche à sa fin et nous allons procéder à leur analyse.

Sœurs Emilie, Maylis et Violaine

Coté frères

Notre chantier a commencé – fait simple mais significatif – par un message fraternel du comité des frères au comité des sœurs, pour la Toussaint. Notre comité a repris, pas à pas, la fiche du chantier pour en délimiter les enjeux, soit : écouter, discerner, proposer, en vue de mieux vivre la relation frères-sœurs. A la rencontre des frères de La Flatière, une proposition a fait écho à notre démarche en cours : « continuer à assumer notre autonomie de frères, et prendre soin de la communion avec nos sœurs en les accueillant comme un don ». En lien avec les sœurs, des rencontres avec d’autres communautés se préparent pour entendre comment s’y vit la communion entre hommes et femmes.

Frères François-Marie, Pierre-Benoît et Pierre-Emmanuel

5. Chantier « Rythme de vie »

Côté sœurs

Le chantier « rythme de vie » a invité toutes les fraternités des sœurs à entreprendre un processus d’échange et d’approfondissement pour évaluer la situation de chaque fraternité   par rapport à son rythme de vie propre et surtout aussi pour se rendre compte d’un chemin déjà commencé ou envisager l’adaptation de ce rythme  pour mieux « nourrir, équilibrer et unifier la vie de prière et la vie fraternelle en relation avec le monde » et aussi la vie de chaque sœur. Les fraternités sont invitées à échanger sur des questions comme :
 – Quels bénéfices a-t-on tiré des adaptations pour la vie des personnes et la fraternité ?
 – Quelles difficultés subsistent pour la fraternité ?
Premiers pas pour avoir une base commune afin d’avancer ensemble.

Sœurs Edyta, Pascale et Sarah-Marie

Coté frères

Notre comité a changé sa problématique en cours de route : de rythme de vie, nous sommes passés à notre identité monastique. Notre dernière rencontre a été l’occasion d’un dépassement. On a arrêté de tourner autour de rien et un signe d’un nouveau départ est apparu : il s’agit de formuler un questionnaire pour lequel nous n’arrivions pas vraiment à démarrer. Frère Philippe a formulé un modèle de questions afin d’expliciter le mot moine. Nous allons bientôt proposer au groupe miroir un questionnaire à examiner.

Frères Ireneusz Maria, Jean-Gabriel et Philippe

6. Chantier « Formation permanente »

Côté sœurs

Concernant notre travail sur le chantier « Formation permanente » pour ces prochains mois il s’agira d’élaborer, ensemble avec les collaboratrices nommées de chaque fraternité, un questionnaire personnel qui est en train de naître… Les référentes auront à animer dans leur fraternité avec toutes un partage ou brainstorming sur la question de la définition de cette parole « formation permanente » : Qu’est-ce que cela signifie, formation permanente pour nous ? Selon la demande de la feuille de route, nous allons établir un état de lieux des formations communautaires et individuelles faites les dernières 10 années dans chaque fraternité. Nous travaillons aussi à créer une base de données – en plusieurs langues – des documents d’Église sur ce sujet, mais aussi des propositions de « ratio formationis » d’autres communautés qui ont travaillé ce sujet ces dernières années.

Sœurs Arlette, Chiara et Marlene

Coté frères

Nous avons commencé notre travail en créant un questionnaire pour faire un état des lieux des études de chaque frère, les insuffisances de notre formation professionnelle, théologique, monastique et permanente, et nos désirs en ces domaines. Nous avons envoyé le questionnaire à tous les frères et avons reçu les réponses. Nous travaillons maintenant à synthétiser et à rassembler les propositions et thématiques pour les étapes suivantes.

Frères Benedikt, Giovanni Battista et Jakub

7. Chantier « Livre de Vie »

Côté sœurs

La finalité de ce chantier est de mener un discernement sur le texte du Livre de Vie et de lui donner sa juste place dans notre vie religieuse à Jérusalem.
Pour ceci, une étape importante proposée par nos assistants consiste à croiser deux lectures : l’une à partir de l’expérience de vie des frères et sœurs de Jérusalem et de leur regard nuancé, et l’autre à partir d’un regard « critique » d’experts de divers disciplines (bibliste, théologien de spiritualité, psychologue…). Les assistants choisissent ces experts et les introduisent au travail. Quant à nous, nous travaillons donc actuellement à recueillir la lecture « expérientielle » des (frères et) soeurs, grâce à un questionnaire.

Sœurs Edith, Marie-Elisabeth et Stéphanie 

Coté frères

Le chantier Livre de Vie a pour objet de réaliser une relecture critique de notre tracé spirituel, en vue de l’avenir, en vue de notre vie consacrée réformée, pour le bien de chacun d’entre nous et de notre appel.
Deux équipes sont à l’œuvre cette année :
– D’un côté, 5 ou 6 experts (un patrologue, un exégète, un psychologue, un théologien de la vie spirituelle, …) contactés par nos assistants apostoliques liront le Livre de vie à la lumière de leur expertise propre.
– De l’autre, tous les frères et sœurs. Tous ont été invités à partager leur expérience du Livre de Vie, à travers un questionnaire – différent pour les frères et pour les sœurs, selon nos sensibilités masculine et féminine – qui permet de dire quelle a été l’incidence du Livre de Vie dans notre cheminement.
Nous croiserons les résultats de l’écoute des frères et des sœurs, puis nous confronterons notre écoute au travail des experts. Dans une étape successive, nous pourrons écouter aussi d’anciens membres de la communauté. Nous pourrons écouter aussi des laïcs, des proches de la communauté, mais aujourd’hui nous donnons la priorité à notre expérience de frères et sœurs membres actuels de nos fraternités.

Frères Antoine-Emmanuel, Charles-Marie et Mateusz

8. Chantier « Compréhension du rapport au travail »

Côté sœurs

A l’aide d’un formulaire, chaque sœur a été invitée à s’exprimer sur son travail. Cela viendra nourrir la réflexion sur ce vaste sujet. Nous sollicitons aussi des personnes extérieures (laïcs ou consacrés) sur la réalité du monde du travail aujourd’hui.

Sœurs Anne-Silouane, Bethany et Maria Paola 

Coté frères

Notre comité a proposé un premier questionnaire au groupe-miroir début décembre 2022. Les réponses sont arrivées dans la première semaine de décembre. Le questionnaire a été retravaillé et une version définitive a été envoyée à tous les frères debut janvier avec une réponse prévue pour le début février. A ce jour, 26 frères de l’institut on répondu. Maintenant nous devons relire ensemble le questionnaire et éventuellement le soumettre à un regard extérieur (une proposition a été faite concernant un sociologue des religions). Nous avons aussi rencontré l’équipe des sœurs fin décembre et de nouveau en février. Pour Pâques, nous visons à faire émerger des « lignes guide », des « tendances » dans la conception du travail selon les frères.

Frères Carlo, Joseph et Matteo

9. Chantier « Questions économiques »

Ce chantier est piloté par Monsieur Bruno Bizet, un laïc indépendant expert en son domaine, à qui il est demandé d’établir un diagnostic financier des deux Instituts, en lien avec les économes généraux des frères et des sœurs. Le champ d’étude couvre les deux niveaux local et général, ainsi que les structures associatives associées. Il s’agit d’identifier comment assurer un fond susceptible d’assurer les pensions de retraite, le soin des membres, la formation, ainsi que l’accompagnement des membres sortants ou sortis. Le terme de la mission est fixé à juin 2023 pour être présenté aux rencontres du mois d’août.

* Pour chaque chantier, un comité conduit le travail de réflexion et de propositions, à partir d’une feuille de route. Le comité consulte régulièrement un groupe de frères et/ou soeurs, appelé groupe miroir. Son rôle est de réagir et de conseiller membres du comité dans l’avancement du chantier ; il s’assurera que les diversités sont prises en compte dans leur travail.

Agenda : les principales dates-repères

30 mars 2022 : réception de la lettre du Préfet du Dicastère pour les religieux aux frères et sœurs de Jérusalem leur demandant de lancer le processus de Discernement et de RéformeIl nomme les deux assistants apostoliques.

26 mai 2022 : première rencontre de tous les frères et sœurs avec les assistants apostoliques en visioconférence, et réception des « échos de la visite apostolique ».

22-26 août 2022 : assemblée de tous les frères et sœurs sous la modération des assistants apostoliques, pour mettre en route le processus de discernement et de réforme. Organisation du travail et lancement des chantiers.

21-23 janvier 2023 : assemblée de tous les frères à la Flatière. Retrouvez les échos de cette assemblée en cliquant ici.

16 mars 2023 : prochaine rencontre de travail de l’équipe « Information ».

22-24 avril 2023 : session de toutes les sœurs sur le thème de l’obéissance en webinaire. La session est préparée par trois sœurs, en lien avec le chantier « Gouvernance ».

Pâques 2023 : chaque chantier devra remettre un point d’étape de ses travaux aux assistants apostoliques et aux conseils généraux.

Août 2023 : nouvelle assemblée d’une part de toutes les sœurs de leur côté, de tous les frères de leur coté, et des frères et sœurs réunis. Point d’étape du processus et lancement du travail pour l’année suivante.

© 2023 Fraternités Monastiques de Jérusalem  
Lettre d’information « Discernement & réforme » – communication@fraternites-jerusalem.org

Où en sommes-nous ? 

Sœurs, frères ou laïcs, nous sommes éprouvés profondément car nous avons pris conscience de dysfonctionnements structurels au sein de la famille de Jérusalem.
Honte, amertume et tristesse : ce sont les émotions qui sont les nôtres à chaque mise en cause de nos communautés et de leur fondateur dans des livres ou les médias.
Colère et désarroi étreignent nos cœurs devant les souffrances psychologiques inacceptables endurées par des sœurs ou des frères qui nous étaient ou sont encore proches. Qu’ils aient quitté la communauté ou qu’ils soient encore parmi nous, nous souffrons avec eux de ce qu’ils ont vécu ou vivent encore comme des traumatismes et des injustices.
C’est pourquoi nous nous sommes engagés dans un processus de discernement et de réforme avec l’aide des deux assistants apostoliques qui nous ont été donnés par le Dicastère des religieux.
Information, dialogue et transparence : voilà notre contribution et notre engagement pour vous rendre compte, par cette lettre d’information et les suivantes, de l’avancée des chantiers que nous avons mis en œuvre depuis notre rencontre du mois d’août 2022 à Magdala.
Voilà ce qui nous anime : cette nouvelle espérance pour que chacun puisse pleinement vivre l’appel commun qui nous a rassemblés en Jérusalem.

L’équipe « Information » des Fraternités de Jérusalem.
Sœur Anne, sœur Marie-Laure, frère Grégoire, frère Marc-Abraham
et Paul-Hervé Vintrou (membre des fraternités laïques de Jérusalem)

Le contenu de cette lettre d’information :

POURQUOI NOUS EN SOMMES LÀ     

Notre reconnaissance des dysfonctionnements

Pour rendre compte des dysfonctionnements, voici un verbatim des « échos de la visite apostolique », retours de la Visite apostolique de 2021, que les assistants apostoliques, sœur Emmanuelle Maupomé, s.a. et frère Bruno Cadoré, o.p., nous ont adressé en mai 2022. Ce qu’ils pointent concorde avec les constats que nos frères et sœurs sortis ont dénoncés à la cellule d’écoute. Ces maladies diagnostiquées constituent le point de départ des travaux dans lesquels les frères et sœurs se sont lancés. Comme vous le comprendrez, ces chantiers vont nécessiter du temps et de la persévérance.

« Nous sommes vraiment inquiets devant le grand nombre de sœurs et de frères rencontrés qui ne vont pas bien : fatigue, épisodes de dépression ou de « burn-out », sentiment amer d’avoir été trop peu écoutés et respectés comme personnes, voire malmenés… [Nous voyons] aussi des signes de santé qui permettent de penser qu’un chemin est possible. »

« Bien des éléments de la personnalité [du fondateur], de la manière dont il a conduit cette fondation, sont à double valence, à la fois porteurs de grâces mais aussi de risques qui ont pu laisser des traces dans vos pratiques actuelles… Nous avons pu avoir le sentiment qu’à certains moments le succès de sa fondation passait avant le bien des personnes. Certains se sont parfois sentis utilisés, voire instrumentalisés… et ont été mis en danger humain et spirituel, voire un peu « brûlés ». »

« La fatigue et le malaise [des frères et sœurs] ne tiennent peut-être pas seulement à votre rythme mais à une question plus fondamentale, liée à la manière dont votre charisme s’est constitué… un mille-feuille qui peine à trouver sa propre cohérence, son propre point d’équilibre. »

« L’autorité semble s’exercer sur un mode très abbatial, mais bien des règles de sagesse et d’équilibre du gouvernement abbatial semblent peu pratiquées, comme le principe de subsidiarité ou celui de l’exercice de vrais contre-pouvoirs… ainsi que le peu de place réellement donnée à l’autorité des Chapitres Généraux. »

« Nous avons bien souvent noté l’absence de lieux et processus de décisions et d’action, clairs, objectifs, identifiables par tous et toutes, justes aux deux niveaux, local et général : ce qui ouvre la voie soit à des décisions arbitraires des supérieurs, soit à l’incapacité à prendre ensemble de vraies décisions et à faire évoluer le système. »

« L’absence de politique de formation va de pair avec l’absence de réflexion globale sur la place des études de théologie et la forme qu’elles doivent prendre pour s’intégrer dans la vie religieuse de chacun/e. »

« [Pour la relation entre les frères et les sœurs], l’absence de processus réguliers et clairs de concertation et de décision commune entre les communautés locales, comme entre les supérieurs généraux aboutit inévitablement à des situations complexes… [et une incapacité à] définir ensemble le « commun » du charisme de Jérusalem. »

« Un certain flou quant au droit et aux règles canoniques a parfois fait grande violence à certaines personnes et à certaines fraternités… la Congrégation suggère d’entreprendre un travail de révision des Constitutions, en lien avec des canonistes ; on doit tout particulièrement veiller à… assurer les contre-pouvoirs et les possibilités de recours, ainsi que ceux permettant la subsidiarité… [pour que] la responsabilité de chacun(e) soit promue. »

Sœur Emmanuelle Maupomé et frère Bruno Cadoré, assistants apostoliques

Les 4 axes de réforme demandés par Rome

Dans la lettre du 30 mars 2022 adressée à nos Fraternités par le préfet du Dicastère pour les religieux, le Siège apostolique donne des directives et indications pour accompagner un processus de discernement et de réforme. Celui-ci se déroulera selon quatre axes : 

  • mieux exprimer le charisme qui nous est propre ; 
  • retravailler nos textes canoniques (les Constitutions) ; 
  • poursuivre l’élaboration d’un programme de formation permanente à la lumière du charisme ; 
  • célébrer une Assemblée générale des deux Instituts, avec des temps communs et des temps propres à chaque Institut, afin de prendre les décisions nécessaires pour mettre en œuvre ce processus de réforme. 

Nous entrons avec confiance dans ce processus et exprimons notre gratitude envers l’Eglise qui accompagne avec sollicitude cette nouvelle étape de la vie de nos Instituts.

LES TRAVAUX EN COURS     

Mettre en route
un processus de discernement et de réforme

(article publié dans la Lettre de Jérusalem n° 24 de septembre 2022)

Du 22 au 26 août, les frères et sœurs – presque tous réunis à Magdala – ont vécu une assemblée de travail avec nos assistants apostoliques, sœur Emmanuelle Maupomé et frère Bruno Cadoré, afin de mettre en route un processus de discernement et de réforme demandé à nos Instituts par le Dicastère pour les Instituts de Vie Consacrée et les Sociétés de Vie Apostolique (DIVCSVA), dans le but de remédier à des dysfonctionnements relevés au cours de la récente visite apostolique ou dénoncés par des témoignages d’anciens membres des Fraternités. Un comité animateur composé de six frères et sœurs qui ne sont pas en responsabilité d’autorité dans nos Instituts a participé avec les assistants apostoliques à l’organisation de ces journées. En tant que membres de ce comité, nous avons pu expérimenter une grande confiance et un large espace d’expression : ce fut une expérience très précieuse et formatrice, bien qu’éprouvante physiquement et psychologiquement. La joie de travailler ensemble frères et sœurs dans une ambiance vraiment fraternelle, avec respect et liberté, a été une grande richesse.

La première étape a été de nous écouter les uns les autres : il a été important que chacun puisse s’exprimer sur sa perception et sa position par rapport aux événements qui ont marqué la vie de ‘Jérusalem’ au cours des trois dernières années. Ces journées ont laissé l’espace à la parole de chacun : peur ou confiance, souffrance et colère parfois. Même si elle n’est pas toujours facile à entendre et à recevoir, une parole un peu plus vraie a pu se vivre entre nous.

Cela a été l’occasion de prendre en compte les inquiétudes et les blessures qui ont pu émerger et être exprimées – parfois par des cris de souffrance et de désespoir – par les frères et sœurs, mais aussi celles qui nous sont parvenues de ceux et celles qui ont quitté nos communautés ; et d’avancer ainsi dans une prise de conscience des dynamiques problématiques ou mauvaises qui traversent nos communautés.
Nous avons aussi pris le temps de recevoir ensemble ce qui fait notre identité de ‘Jérusalem’ avec l’objectif tout particulier de mettre en valeur ce qui nous anime, afin d’identifier les axes fondamentaux de la vie et du patrimoine de ‘Jérusalem’. Des convergences sont très vite apparues dans les thèmes abordés, ouvrant sur des bases communes et laissant croire qu’il y aurait peu de divergences. En réalité, travailler les éléments plus en profondeur a mis en lumière que leur compréhension ou encore leur mise en œuvre concrète révélaient des divergences de fond entre frères et sœurs ou encore entre membres d’un même Institut.
Nous avons ainsi pris conscience de l’extrême diversité des attentes de chacun vis-à-vis des réformes à entreprendre : si nous avons tous le désir d’avancer, nous n’avons pas tous la même notion du temps et des priorités. Il nous faudra aussi grandir dans ce processus de discernement communautaire ouvert cet été, pour assumer sereinement les différences de point de vue et de vision qui émergent au fil des échanges.

Au-delà des questions que nous travaillons frères et sœurs en commun, nous avons pu toucher du doigt le fait que chaque Institut rencontre des problématiques propres ou a besoin d’approfondissements sur certains sujets particuliers. Une journée a ainsi été consacrée au travail par Institut séparément : sœurs et frères ayant ainsi la possibilité, chacun de leur côté, de s’informer, de réfléchir et d’échanger sur des thématiques qui leur sont propres. Ainsi la question délicate de la gouvernance a été abordée par les sœurs : des mots précis ont pu être posés, partagés, et un travail sur les dysfonctionnements à ne plus reproduire a pu voir le jour. Les frères ont pu échanger sur leurs inquiétudes, voire leurs peurs, et leurs convictions et certitudes quant à l’expression de l’identité propre des frères de Jérusalem, la question des petits effectifs et leur perception de la communion frères-sœurs.
Autant de questionnements qui touchent fondamentalement notre vocation, et la possibilité de s’en saisir – même si les temps de dialogue et de travail ont parfois pu se révéler laborieux ou tendus – a permis de commencer à mettre un peu plus de clarté et d’ouvrir des pistes pour l’avenir.

Au terme de ces cinq journées, plusieurs chantiers à engager ont émergé. Parmi eux, ceux du rythme de vie, du rapport au travail, de la gouvernance, de la communion entre frères et sœurs, de la formation, de la liturgie, de l’histoire de nos communautés, … Le travail va continuer dans les semaines et mois qui viennent pour, au terme, ajuster la vie de nos communautés à ces exigences nouvelles et pouvoir en rendre compte au DIVCSVA.

Sœurs Arlette, Claire et Maria-Magdalena &
frères Carlo, Marc-Abraham et Victor-Marie

Les chantiers “discernement & réforme” :
comment ça marche ?

A la suite de nos rencontres fraternelles de fin août à Magdala, 9 chantiers prioritaires ont été identifiés pour remédier aux dysfonctionnements. Des feuilles de route ont été élaborées à partir du travail effectué par l’ensemble des frères et sœurs présents, par les deux prieurs généraux de nos Instituts, et par les deux assistants apostoliques qui accompagnent ce “chemin de discernement et de réforme” de nos Instituts.
Ces chantiers sont confiés à des équipes de petites tailles : 3 frères d’un côté, 3 sœurs de l’autre. Les frères et les sœurs travaillent indépendamment afin de prendre en compte les questions propres à leur Institut, et croisent ensuite leurs résultats. Ces comités se sont mis au travail depuis plusieurs semaines, et se réunissent régulièrement, pour la plupart de façon hebdomadaire.
Dans le cadre de leur travail, ils ont pu et peuvent faire appel à différents frères et sœurs de nos Instituts (notamment les « groupes miroir » dont le rôle est de réagir et de conseiller les membres du comité dans l’avancement du chantier), à l’ensemble des frères et sœurs sous forme de consultation plus large, ou encore à des laïcs, des experts extérieurs à nos communautés, certains de ces experts ayant été nommés par les assistants apostoliques.

Les 9 chantiers prioritaires concernent l’histoire et le fondateur, la gouvernance, la liturgie et vie de prière, la compréhension de la Communion frères-soeurs, le rythme de vie, la formation permanente, le Livre de Vie, la compréhension du rapport au travail et les questions économiques.

1. Chantier “Histoire et fondateur”

Les deux comités (2 frères, 3 sœurs) du chantier : Histoire et Fondateur, après avoir démarré ce chantier avec les assistants, ont réfléchi séparément puis ensemble à la nature du travail historique à faire et à la collaboration avec un ou plusieurs historiens.
Avec l’aide des frères du « groupe-miroir » et des sœurs qui avaient manifesté de l’intérêt pour ce chantier, nous avons collecté les questionnements importants par rapport à notre histoire et à frère Pierre-Marie.  Nous avons commencé à faire le recensement de tous les documents sources que nous avons, et à établir une chronologie de l’histoire des Fraternités.
Nous avons également eu une rencontre avec sœur Rafala qui nous a expliqué les normes de communication des archives, dans la société civile et dans l’Église, surtout par rapport à la discrétion et à la protection de la vie privée des personnes encore vivantes.
Enfin, un contact a été pris par les prieurs généraux et leurs conseils avec l’historien que les assistants ont pressenti pour le travail. Si ce choix est confirmé, nous espérons entrer bientôt en contact avec lui.
Nous travaillons aussi sur un cadre qui aiderait nos Fraternités, selon ce qui nous est demandé, à déterminer la manière de se référer à frère Pierre-Marie et à ses écrits en attendant les conclusions du travail historique.

Sœurs Christine, Hannah, Marie-Laure
& frères Antoine-Emmanuel et Charles-Marie

2. Chantier « Gouvernance »

Côté sœurs

Pour ne pas passer à côté d’éléments déterminants pour l’avancée de ce chantier, nous avons besoin de prendre le temps nécessaire pour une étude approfondie. Nous voulons recueillir ensemble ce qui nous est dit personnellement et communautairement, à travers la relecture et l´analyse des dysfonctionnements nommés, afin de trouver des réponses adaptées. Il s’agit pour nous de faire, autant que possible, un travail sur les racines, les nœuds des dysfonctionnements en faisant appel à différentes ressources interdisciplinaires.
Si nous avons décidé de consacrer six mois de travail à la relecture (avec de l’aide externe) et au classement des dysfonctionnements, c’est parce que nous les prenons au sérieux et que nous voulons leur donner toute leur importance. Il s´agit d´abord d´entendre la souffrance, de prendre conscience des répercussions que ces dysfonctionnements ont pu causer, d´aider à reconnaître nos responsabilités et à les prendre. Il s’agit aussi de prendre conscience des conséquences que ces dysfonctionnements ont pu avoir sur notre conception même de l’obéissance et notre manière d’obéir.
C’est pourquoi nous commençons un travail de classification et de qualification des dysfonctionnements avec différents experts (théologiens, canonistes, personnes de longue expérience de la vie consacrée, psychologues, civilistes, etc …) pour objectiver et nommer ce qui peut être considéré comme abus, maladresse, flou, erreur, manque de bon sens ou de savoir-faire, manque de respect ou ignorance du droit ecclésial dans nos structures et manières de gouverner, mais aussi pour commencer à trouver des chemins de transformation, de conversion, des voies de sortie.

Sœurs Anne-Catherine, Anne-Claire, Claire et Maria-Magdalena  

Coté frères

Dans un premier temps, le travail du chantier “gouvernance” est d’établir une liste et d’effectuer une relecture des dysfonctionnements observés et vécus dans l’Institut des frères. Nous avons donc réalisé un questionnaire afin d’interroger tous les frères de l’Institut, dans le but, une fois les réponses rassemblées, d’en proposer une analyse, en lien avec le rapport de la cellule d’écoute et les documents de la visite apostolique. Le questionnaire envoyé aux frères est également l’occasion de recenser les expériences positives de vie capitulaire, de synodalité et subsidiarité dont ils ont fait l’expérience ces dernières années. De manière simultanée, notre groupe a commencé de faire des recherches documentaires sur le vœu d’obéissance et tout particulièrement la “matière” de ce vœu, en nous laissant interroger par ce que les autres traditions monastiques et religieuses proposent. 

Frères Jean-Yves, Marc-Abraham et Théophane

3. Chantier « Liturgie et vie de prière »

Côté sœurs

Le but de notre chantier est, dans l’immédiat, de faire un état des lieux de notre vie de prière sous tous ses aspects et pour cela nous avons élaboré un questionnaire, envoyé à chaque sœur. Cela nous permettra de mieux comprendre quels sont les points qui « souffrent » le plus et ceux qui, au contraire, « se portent bien ». En fonction de cela, nous pourrons envisager le travail à faire ensuite. Une autre partie du travail est de collecter ce qui a été travaillé par l’une ou l’autre d’entre nous sur le thème de la liturgie ou de la prière, en général, pour en faire une sorte de « bibliothèque » à mettre à la disposition de tous. La troisième partie concerne la collecte de tout ce qui s’est fait dans les différentes fraternités comme adaptations de la liturgie et des raisons qui ont porté à ces choix.

Sœurs Joanna, Marie-Aimée et Petra 

Coté frères

Le chantier s’est mis au travail en reprenant à son compte les documents de la cellule d’écoute et les « échos de la visite apostolique », ainsi que des orientations suggérées par le conseil des frères. Une consultation individuelle est organisée pour que chaque frère puisse s’exprimer sur sa réception de ces documents et sur ce qu’il souhaite vivre de manière plus unifiante dans sa vie de prière et la liturgie de Jérusalem. Nous rassemblons aussi les initiatives déjà engagées dans certaines fraternités pour améliorer la qualité de la liturgie. Parallèlement, des contacts sont pris avec des personnes extérieures qualifiées pour nous éclairer dans notre démarche.

Frères Pierre-Adrien, Stéphane-Marie et Victor-Marie

4. Chantier « Compréhension de la communion frères et sœurs de Jérusalem »

Côté sœurs

Notre travail dans le chantier « Compréhension de la communion frères et sœurs de Jérusalem » a commencé par une première étape d’état des lieux et d’analyse. C’est de manière distincte qu’il nous a été proposé de la mener, frères d’un côté et soeurs de l’autre, afin que, de chaque côté, nous puissions aller au bout des questionnements et de l’écoute des points de convergence et de dissensus, sans a priori, en évitant de pseudo-évidences qui risqueraient de s’imposer. C’est ainsi que, côté sœurs, nous avons mis en place dans chaque fraternité un travail sur le lexique de notre relation frères/soeurs : communion, autonomie, complémentarité, etc… pour tâcher de voir quelle(s) réalité(s) se cachent derrière ces mots que nous utilisons si souvent. Nous avons également envoyé un questionnaire à chaque sœur de l’Institut, lui permettant de rendre compte d’expériences positives ou plus difficiles avec les frères, et d’en proposer une relecture. En ce début de février 2023, la phase de collecte des données touche à sa fin et nous allons procéder à leur analyse.

Sœurs Emilie, Maylis et Violaine

Coté frères

Notre chantier a commencé – fait simple mais significatif – par un message fraternel du comité des frères au comité des sœurs, pour la Toussaint. Notre comité a repris, pas à pas, la fiche du chantier pour en délimiter les enjeux, soit : écouter, discerner, proposer, en vue de mieux vivre la relation frères-sœurs. A la rencontre des frères de La Flatière, une proposition a fait écho à notre démarche en cours : « continuer à assumer notre autonomie de frères, et prendre soin de la communion avec nos sœurs en les accueillant comme un don ». En lien avec les sœurs, des rencontres avec d’autres communautés se préparent pour entendre comment s’y vit la communion entre hommes et femmes.

Frères François-Marie, Pierre-Benoît et Pierre-Emmanuel

5. Chantier « Rythme de vie »

Côté sœurs

Le chantier « rythme de vie » a invité toutes les fraternités des sœurs à entreprendre un processus d’échange et d’approfondissement pour évaluer la situation de chaque fraternité   par rapport à son rythme de vie propre et surtout aussi pour se rendre compte d’un chemin déjà commencé ou envisager l’adaptation de ce rythme  pour mieux « nourrir, équilibrer et unifier la vie de prière et la vie fraternelle en relation avec le monde » et aussi la vie de chaque sœur. Les fraternités sont invitées à échanger sur des questions comme :
 – Quels bénéfices a-t-on tiré des adaptations pour la vie des personnes et la fraternité ?
 – Quelles difficultés subsistent pour la fraternité ?
Premiers pas pour avoir une base commune afin d’avancer ensemble.

Sœurs Edyta, Pascale et Sarah-Marie

Coté frères

Notre comité a changé sa problématique en cours de route : de rythme de vie, nous sommes passés à notre identité monastique. Notre dernière rencontre a été l’occasion d’un dépassement. On a arrêté de tourner autour de rien et un signe d’un nouveau départ est apparu : il s’agit de formuler un questionnaire pour lequel nous n’arrivions pas vraiment à démarrer. Frère Philippe a formulé un modèle de questions afin d’expliciter le mot moine. Nous allons bientôt proposer au groupe miroir un questionnaire à examiner.

Frères Ireneusz Maria, Jean-Gabriel et Philippe

6. Chantier « Formation permanente »

Côté sœurs

Concernant notre travail sur le chantier « Formation permanente » pour ces prochains mois il s’agira d’élaborer, ensemble avec les collaboratrices nommées de chaque fraternité, un questionnaire personnel qui est en train de naître… Les référentes auront à animer dans leur fraternité avec toutes un partage ou brainstorming sur la question de la définition de cette parole « formation permanente » : Qu’est-ce que cela signifie, formation permanente pour nous ? Selon la demande de la feuille de route, nous allons établir un état de lieux des formations communautaires et individuelles faites les dernières 10 années dans chaque fraternité. Nous travaillons aussi à créer une base de données – en plusieurs langues – des documents d’Église sur ce sujet, mais aussi des propositions de « ratio formationis » d’autres communautés qui ont travaillé ce sujet ces dernières années.

Sœurs Arlette, Chiara et Marlene

Coté frères

Nous avons commencé notre travail en créant un questionnaire pour faire un état des lieux des études de chaque frère, les insuffisances de notre formation professionnelle, théologique, monastique et permanente, et nos désirs en ces domaines. Nous avons envoyé le questionnaire à tous les frères et avons reçu les réponses. Nous travaillons maintenant à synthétiser et à rassembler les propositions et thématiques pour les étapes suivantes.

Frères Benedikt, Giovanni Battista et Jakub

7. Chantier « Livre de Vie »

Côté sœurs

La finalité de ce chantier est de mener un discernement sur le texte du Livre de Vie et de lui donner sa juste place dans notre vie religieuse à Jérusalem.
Pour ceci, une étape importante proposée par nos assistants consiste à croiser deux lectures : l’une à partir de l’expérience de vie des frères et sœurs de Jérusalem et de leur regard nuancé, et l’autre à partir d’un regard « critique » d’experts de divers disciplines (bibliste, théologien de spiritualité, psychologue…). Les assistants choisissent ces experts et les introduisent au travail. Quant à nous, nous travaillons donc actuellement à recueillir la lecture « expérientielle » des (frères et) soeurs, grâce à un questionnaire.

Sœurs Edith, Marie-Elisabeth et Stéphanie 

Coté frères

Le chantier Livre de Vie a pour objet de réaliser une relecture critique de notre tracé spirituel, en vue de l’avenir, en vue de notre vie consacrée réformée, pour le bien de chacun d’entre nous et de notre appel.
Deux équipes sont à l’œuvre cette année :
– D’un côté, 5 ou 6 experts (un patrologue, un exégète, un psychologue, un théologien de la vie spirituelle, …) contactés par nos assistants apostoliques liront le Livre de vie à la lumière de leur expertise propre.
– De l’autre, tous les frères et sœurs. Tous ont été invités à partager leur expérience du Livre de Vie, à travers un questionnaire – différent pour les frères et pour les sœurs, selon nos sensibilités masculine et féminine – qui permet de dire quelle a été l’incidence du Livre de Vie dans notre cheminement.
Nous croiserons les résultats de l’écoute des frères et des sœurs, puis nous confronterons notre écoute au travail des experts. Dans une étape successive, nous pourrons écouter aussi d’anciens membres de la communauté. Nous pourrons écouter aussi des laïcs, des proches de la communauté, mais aujourd’hui nous donnons la priorité à notre expérience de frères et sœurs membres actuels de nos fraternités.

Frères Antoine-Emmanuel, Charles-Marie et Mateusz

8. Chantier « Compréhension du rapport au travail »

Côté sœurs

A l’aide d’un formulaire, chaque sœur a été invitée à s’exprimer sur son travail. Cela viendra nourrir la réflexion sur ce vaste sujet. Nous sollicitons aussi des personnes extérieures (laïcs ou consacrés) sur la réalité du monde du travail aujourd’hui.

Sœurs Anne-Silouane, Bethany et Maria Paola 

Coté frères

Notre comité a proposé un premier questionnaire au groupe-miroir début décembre 2022. Les réponses sont arrivées dans la première semaine de décembre. Le questionnaire a été retravaillé et une version définitive a été envoyée à tous les frères debut janvier avec une réponse prévue pour le début février. A ce jour, 26 frères de l’institut on répondu. Maintenant nous devons relire ensemble le questionnaire et éventuellement le soumettre à un regard extérieur (une proposition a été faite concernant un sociologue des religions). Nous avons aussi rencontré l’équipe des sœurs fin décembre et de nouveau en février. Pour Pâques, nous visons à faire émerger des « lignes guide », des « tendances » dans la conception du travail selon les frères.

Frères Carlo, Joseph et Matteo

9. Chantier « Questions économiques »

Ce chantier est piloté par Monsieur Bruno Bizet, un laïc indépendant expert en son domaine, à qui il est demandé d’établir un diagnostic financier des deux Instituts, en lien avec les économes généraux des frères et des sœurs. Le champ d’étude couvre les deux niveaux local et général, ainsi que les structures associatives associées. Il s’agit d’identifier comment assurer un fond susceptible d’assurer les pensions de retraite, le soin des membres, la formation, ainsi que l’accompagnement des membres sortants ou sortis. Le terme de la mission est fixé à juin 2023 pour être présenté aux rencontres du mois d’août.

* Pour chaque chantier, un comité conduit le travail de réflexion et de propositions, à partir d’une feuille de route. Le comité consulte régulièrement un groupe de frères et/ou soeurs, appelé groupe miroir. Son rôle est de réagir et de conseiller membres du comité dans l’avancement du chantier ; il s’assurera que les diversités sont prises en compte dans leur travail.

Agenda : les principales dates-repères

30 mars 2022 : réception de la lettre du Préfet du Dicastère pour les religieux aux frères et sœurs de Jérusalem leur demandant de lancer le processus de Discernement et de RéformeIl nomme les deux assistants apostoliques.

26 mai 2022 : première rencontre de tous les frères et sœurs avec les assistants apostoliques en visioconférence, et réception des « échos de la visite apostolique ».

22-26 août 2022 : assemblée de tous les frères et sœurs sous la modération des assistants apostoliques, pour mettre en route le processus de discernement et de réforme. Organisation du travail et lancement des chantiers.

21-23 janvier 2023 : assemblée de tous les frères à la Flatière. Retrouvez les échos de cette assemblée en cliquant ici.

16 mars 2023 : prochaine rencontre de travail de l’équipe « Information ».

22-24 avril 2023 : session de toutes les sœurs sur le thème de l’obéissance en webinaire. La session est préparée par trois sœurs, en lien avec le chantier « Gouvernance ».

Pâques 2023 : chaque chantier devra remettre un point d’étape de ses travaux aux assistants apostoliques et aux conseils généraux.

Août 2023 : nouvelle assemblée d’une part de toutes les sœurs de leur côté, de tous les frères de leur coté, et des frères et sœurs réunis. Point d’étape du processus et lancement du travail pour l’année suivante.

© 2023 Fraternités Monastiques de Jérusalem  
Lettre d’information « Discernement & réforme » – communication@fraternites-jerusalem.org