Les frères se sont réunis au Foyer de charité de la Flatière du 21 au 23 janvier pour poursuivre leur travail de réforme. Ceux d’entre nous qui ne pouvaient pas se déplacer étaient connectés par visioconférence.

Pourquoi une telle assemblée ?

Au terme des rencontres de fin août, certains frères étaient restés sur leur faim : nous n’étions pas allé assez loin dans l’écoute mutuelle, notamment pour les thématiques propres aux frères.
En novembre, le Conseil général a proposé à chaque frère de répondre à une enquête. Les frères ont confirmé qu’il fallait travailler certains points en plus des chantiers déjà ouverts : l’écoute de la parole des frères blessés, le propre de notre identité monastique, la méthodologie de la réforme…

Comment cela s’est-il passé ?

Nous avons suivi la trame d’un verset du prophète Isaïe (54,2) : Élargis l’espace de ta tente, déploie sans hésiter la toile de ta demeure, allonge tes cordages, renforce tes piquets ! En quatre temps : 1) accueil mutuel, 2) écoute et partage de nos besoins fondamentaux, 3) “forum ouvert” pour approfondir ce qui était recueilli, puis 4) incarnation du fruit des échanges par l’émergence de propositions soumises à tous. Un laïc coach professionnel, Jean-Bernard Bost, a été chargé d’animer et de structurer notre démarche. Il a suscité l’engagement de chacun à travers des “forum ouverts” où tout se construit à partir de l’initiative et de la liberté de parole de chaque frère. Voici les thèmes qui ont émergés, formulées avec les propres mots des participants : “Vie monastique et connexion au monde”, “Quelle contribution voulons-nous apporter au monde ?”, La question du sacerdoce, “En marche vers le Royaume”, “Une liturgie ouverte à tous”, “Peut-on définir Jérusalem sans référence à la ville ?”, Articulation entre oasis et désert, “Notre forme de monachisme”, Biodiversité des fraternités et des vocations, “Quelle taille pour les fraternités ?”, “Des fraternités à projet spécifiques ?” etc.

Où en sommes-nous ?
Chacun a pu approfondir sa liberté d’expression, en disant « je », avec le sentiment d’être vraiment écouté par tous. Pour souligner cette ouverture, un frère a partagé sa reconnaissance de « ne pas être orienté dans un sens ou dans un autre ». Ce qui s’en dégage, c’est davantage de responsabilité de chacun et un engagement communautaire accru. Un frère a témoigné : « J’ai eu l’impression de sentir battre le cœur des frères entendus, et de la communauté dans son ensemble. Cela m’a redonné le goût de la rencontre du frère. » En nous écoutant ainsi, nous avons pu en effet ressentir la fraternité dans sa diversité, mieux comprendre nos différentes perceptions, et en définitive mieux nous connaître.
Pour rendre compte de nos échanges, un frère parle « d’argumentations mûries, exposées sereinement et intelligemment dans une entente réciproque ». Car au-delà de l’expression, nous avons cherché à intégrer les points de vue et élaborer une vision, avec un « sentiment d’affermissement ».
A la fin de notre assemblée, nous avons été invités à faire remonter des propositions, qui ont été soumises au vote ; une manière de faire qui ne nous est pas habituelle. Le but de ces votes était exploratoire, afin d’esquisser des tendances. Pour s’en tenir aux orientations pour lesquelles le consensus était plus évident, on peut citer :

  • l’engagement à continuer à nous écouter et à parler avec franchise ;
  • continuer à assumer une autonomie des frères, tout en prenant soin de la communion avec les sœurs en les accueillant comme un don ;
  • constatant que nous tenons tous à notre dimension monastique, définir les piliers essentiels de celle-ci ;
  • sonder les frères pour savoir qui porte en lui une dimension plus « apostolique », qui se sent davantage appelé au « désert », pour en déduire des expérimentations concrètes.

D’autres orientations ont reçu des avis plus divergents. Bien sûr, nous avons conscience que les propositions qui ont été soumises au vote n’avaient pas été élaborées avec suffisamment de temps et de recul ; en cela, nous les considérons comme une sorte de brouillon à approfondir. Cependant, cet exercice, même trop superficiel, nous a aidés. Il suffit de citer quelques expressions de frères : « Nous avons choisi de choisir », « nous avons dépassé le stade de parler sans prendre des décisions », « je suis reconnaissant pour le pas accompli, avec ce sentiment d’une irréversibilité ».

Cette assemblée a souhaité ne pas empiéter sur les travaux des chantiers déjà lancés, mais plutôt travailler sur la manière de nous y engager, afin que nos travaux intègrent avec respect les questions portées par chaque frère et par le corps communautaire dans son ensemble. La matière de cette assemblée va devoir être assimilée et digérée dans les mois à venir.

Frères Marc-Abraham et Grégoire, pour l’équipe « Information »